Pèlerinage et fête du sacrifice d’Abraham

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Il est fortement encadré par des prescriptions coraniques et des instructions de Mohamed, prophète de l’islam, qui, par l’exemple de sa propre pratique des rituels correspondants, a légué de son vivant à sa communauté et pour la postérité, un véritable code du pèlerinage

Le Hajj est à distinguer de la Ômra ou petit pèlerinage dans la mesure où celle-ci peut se dérouler à tout moment de l’année. On peut qualifier celle-ci de visite pieuse des lieux saints de l’islam, ce qui ne diminue en rien sa haute valeur spirituelle.

Par rapport aux 3 premiers piliers qui sont autant de devoirs stricts (– 1 : Chahada ou profession de foi en l’unicité de Dieu, et en la mission prophétique de Mohamed comme du sceau de la Révélation et digne héritier de la lignée des prophètes et des messagers antérieurs; 2 : Salat ou prière canonique au rythme de cinq fois par jour, à des moments astronomiques précis; 3 : Zakat ou prélèvement purificateur des avoirs (impôt social) au profit des êtres dans le besoin et de la société en général –) le Hajj présente, avec le 4e pilier qu’est le Siyam ou jeûne complet du mois de Ramadan (de l’aube au coucher du soleil) cette particularité qu’il ne s’agit pas d’obligation absolue. Le grand pèlerinage ne devient en effet obligatoire que dès que la personne en a les moyens sur les plans financier et de la santé.

Le Hajj obéit à une série de rites à accomplir avec la ferme et sincère volonté de s’acquitter d’une obligation de foi voulue par Dieu et par Son prophète et messager. C’est ce qui explique l’entrée en état de sacralisation (Tahrim) spirituelle, physique et vestimentaire (port par les hommes de l’Ihram, deux coupons de coton blanc sans couture) symbolisant l’égalité entre les êtres entre eux et devant leur Créateur et Juge miséricordieux.

Le ressourcement et la symbolique

En plus de se ressourcer aux lieux saints qui ont vu passer tant de prophètes et messagers, et se dérouler tellement d’événements qui ont marqué la Création et l’Histoire, il y a lieu de souligner la forte charge symbolique qui s’attache aux différents rites qui font un pèlerinage accompli et agréé.

Ainsi en est-il du parcours rapide entre les 2 collines de Safa et Marwa, tout près de la Kaâba, rappelant le jaillissement de l’eau de Zemzem sous le pied de l’enfant Ismaël, mettant fin ainsi à la course désespérée de sa mère Hagar, les deux ayant été laissés sur place par Abraham sur ordre divin. Boire du puits de Zemzem, c’est s’imprégner du miracle qui a permis à Hagar et à Ismaël de survivre et à une contrée désolée, voire hostile, de prendre vie.

La lapidation des trois stèles incarne quant à elle la lutte contre la tentation du diable (Iblis) à laquelle ont été soumis même les prophètes, épreuve qu’ont dû affronter Abraham, Hagar et Ismaël, ancêtre des musulmans.

De même, la circumambulation rituelle (Tawaf) autour du premier temple sacré, la Kaâba, relève de la commémoration de la réhabilitation du monothéisme dans sa pureté originelle après les dérives historiques de l’associationnisme et du paganisme qui ont résisté au judaïsme et au christianisme originels. Le sanctuaire, érigé pour le culte de Dieu l’Unique par Abraham et son fils aîné Ismaël, reste le point de ralliement terrestre de toutes les prières musulmanes qui s’y dirigent de toutes les régions du monde, à toute heure du jour et de la nuit. C’est le seul endroit de la terre où des fidèles en prière formant des cercles concentriques, peuvent se faire face. Dans le Coran, Dieu prescrit de prier à partir de la « position » d’Abraham; or cette position existe bel et bien tout près de la Kaâba et on peut y admirer la trace des 2 pieds de l’ancêtre patriarche que Dieu considère dans le Coran comme son « ami » (Khalil).

Les rassemblements aux mêmes moments de toute la foule des fidèles (Hajjajs) des deux sexes, de toutes races, cultures et âges à Muzdalifa, Mina, et Ârafat sont autant d’actes de soumission volontaire à Dieu seul (sens étymologique du vocable « islam »), d’égalité originelle, à la naissance) et surtout finale, comme préfiguration du jour du Jugement dernier. C’est ce qui explique la ferveur dans le repentir et dans la quête du pardon divin tout au long du pèlerinage, et particulièrement en ces rassemblements de masse. De plus, la « station » d’Ârafat rappelle avec une acuité frappante le très fameux discours d’adieu du prophète Mohamed prenant les fidèles à témoin devant Dieu tout-puissant, un discours qui dénote par la profondeur de ses mises en garde autant que par son actualité renouvelée sans cesse au cours des siècles.

Pour couronner le pèlerinage, le sacrifice d’une bête reprend cet autre miracle de la mise à l’épreuve de la foi d’Abraham, père des trois lignées monothéistes. Au-delà de la symbolique qui le sous-tend, un tel sacrifice se répète dans la vie de tous les jours, du moins pour les juifs et pour les musulmans, alors que seule la viande d’animaux licites sacrifiés au nom de Dieu peut être consommée. Sur place durant le Hajj comme partout ailleurs dans le monde, et en dépit du caractère obligatoirement festif de l’Aïd al-Adha ou fête du sacrifice, la plus importante en islam, le but n’est pas de faire bombance puisque chaque famille ne peut conserver qu’un tiers de la viande, étant soumise à un devoir de partage : un tiers pour les nécessiteux et le dernier tiers pour les proches.

Un exemple à suivre en matière de partage

Les 2 millions et demi de moutons, bœufs et dromadaires sacrifiés le jour de l’Aïd al-Adha aux lieux saints de l’islam donnent des centaines de milliers de tonnes de viandes qui sont conditionnées, congelées et distribuées aux musulmans les plus démunis à travers le monde. Ici même au Canada et au Québec, une saine tradition a pris forme; elle consiste à offrir à des organismes de charité dûment enregistrés un don en argent équivalent à la valeur d’un agneau, ce qui permettra à une famille palestinienne, libanaise, somalienne, bosniaque ou autre de goûter enfin à de la viande et de célébrer l’Aïd en communion avec le reste des musulmans du monde. Une telle pratique mériterait d’être étendue, du moins au sein des communautés où les besoins, qui doivent être comblés, sont moins criants que dans certains pays musulmans.

Le pardon et le ressourcement dans la lignée abrahamique

En conclusion de ce (trop) rapide tour d’horizon, il est essentiel de rappeler deux éléments fondamentaux :

*
Le Hajj donne l’occasion, s’il est mené sincèrement et convenablement, au futur Hadj ou pèlerin, de reprendre désormais son existence avec un réel ancrage dans la voie de Dieu, comme quelqu’un qui repart à zéro, avec une page blanche destinée à être remplie dans les 2 sens voulus par le Créateur, à savoir la soumission à Lui (élévation transcendantale) intimement liée à la solidarité (actions positives au sein de la communauté humaine). Tel est le sens du repentir et du pardon de la part du Seigneur qui s’est imposé la miséricorde.

* Le Hajj replonge le Hadj dans le ressourcement fondateur abrahamique puisque la plupart des rites – on la bien vu – ont trait à Abraham, qualifié par Dieu dans le Coran comme étant le premier « soumis », c’est-à-dire le premier musulman. Cela est d’une importance capitale car l’islam n’est pas une religion nouvelle, le Coran et le prophète Mohamed étant venus réaffirmer Le Message d’une foi diluée dans le nationalisme judaïque et dans la trinité chrétienne, alors que Dieu se définit par son Universalité et par son Unicité.

Aïd Moubarak Saïd et puisse 2007 être meilleure et porteuse de paix!

Salam.

Touhami Rachid RAFFA,

Québec, le 28 décembre 2006

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